Quatre pages dans La Recherche : « Il faut mieux reconnaître les chercheurs pratiquant la science ouverte »
Le numéro de mai 2020 de La Recherche publie une interview de votre serviteur. A trouver dans les kiosques à journaux qui sont ouverts malgré le confinement. Cette interview de 4 pages est intégralement disponible aux abonnés et dans l’édition papier.
« Il faut mieux reconnaître les chercheurs pratiquant la science ouverte »
Propos recueillis par Cécile Klingler dans mensuel 558 daté mai 2020 – 1981 mots Rendre librement accessibles les résultats de la recherche, tel est l’objectif de la science ouverte. Promoteur et acteur de ce mouvement d’ampleur, Marin Dacos analyse comment les comportements changent dans la communauté scientifique afin de permettre ce bouleversement de l’accès à la connaissance.La Recherche Le dernier baromètre français de la science ouverte indique qu’en décembre 2019, 49 % des 155 000 publications scientifiques françaises (*) publiées en 2018 étaient disponibles en accès ouvert (1). Tous les champs disciplinaires sont-ils concernés ?Marin Dacos Oui, cela s’observe dans toutes les disciplines. Pour les mathématiques, qui sont en tête, le taux d’accès ouvert des publications de 2017 est passé de 62 % en 2018 à 73 % en 2019. En sciences sociales, il est passé de 30 % en 2018 (c’était le taux le plus bas) à 43 % en 2019. Cette augmentation généralisée est très encourageante, parce qu’il est important d’ouvrir les résultats de la recherche au public le plus large. Afin de renforcer le mouvement, le Plan national pour la science ouverte rend l’accès ouvert obligatoire pour les publications issues de travaux financés sur fonds publics dans le cadre d’appels à projets.Y a-t-il un mode d’accès ouvert qui prédomine ?Il y a deux façons d’être diffusé en accès ouvert. La première, ce sont les revues nativement en accès ouvert, sur le site Web de l’éditeur. Avec deux modalités de financement selon les revues : des frais de publication payés par l’auteur, ou un financement forfaitaire de l’éditeur par des acteurs publics. La seconde, ce sont des archives numériques ouvertes. Par exemple arXiv, créée en 1991 par et pour les physiciens ; ou HAL, l’archive nationale française, créée en 2001 par le CNRS. Dans ce cas, c’est l’auteur qui est acteur de l’ouverture, en choisissant de déposer (ou non) ses articles dans une telle archive. Il n’a rien à payer, le lecteur non plus, mais bien sûr le système a un coût. Le baromètre de la science ouverte indique que, sur l’ensemble des articles publiés en 2018, 12 % sont accessibles uniquement sur le site Web de l’éditeur, 16 % seulement sur une archive ouverte, et 21 % à la fois sur le site Web de l’éditeur et sur une archive ouverte.Laquelle de ces deux options le Plan national pour la science ouverte, qui a été mis en place en juillet 2018, privilégie-t-il ?La loi pour une République numérique, votée en 2016, a donné le droit aux chercheurs dont les travaux sont financés pour moitié sur fonds publics de mettre gratuitement à disposition leur article, même s’ils avaient signé un contrat d’exclusivité avec l’éditeur. Il y a tout de même un délai à respecter – six mois pour les sciences exactes et la médecine, douze mois pour les sciences humaines et sociales. Les politiques publiques françaises d’avant 2018 ont très fortement privilégié les archives ouvertes. Ce n’est plus le cas avec le Plan national pour la science ouverte, car il faut tenir compte des usages de chaque discipline. Les mathématiciens passent par les archives ouvertes, et les biologistes par les revues en accès ouvert ? Très bien ! Le plus important est de faciliter l’accès ouvert, quelle que soit la modalité retenue, tout en prenant des précautions concernant les revues avec frais de publication, en raison de leur coût.La science ouverte inclut aussi l’ouverture des données de la recherche. Où en est-on de ce côté-là ?Pour l’instant, c’est une sorte d’Himalaya. Le sujet de l’ouverture des données publiques – dont font partie les données de la recherche – est très récent : les principes fondateurs n’ont été établis qu’en décembre 2007, à Sebastopol, en Californie. Il faut en particulier que les données soient faciles à trouver, accessibles, interopérables et réutilisables – ce qui a donné l’acronyme FAIR. On se heurte au fait qu’il n’existe pas de tradition de partage des données de la recherche à la hauteur de la tradition de partage des publications scientifiques. Les premières revues scientifiques, dont l’objectif est le partage de la connaissance, datent du XVIIe siècle – la première, Le Journal des sçavans, était d’ailleurs française ! Mais pour les données, qui sont pourtant la matière première de la connaissance, il n’y a pas une tradition et des pratiques aussi structurées. Lisez la suite surLa Recherche…