Le regard oblique. Diffusion et appropriation de la photographie amateur dans les campagnes (1900-1950)

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Souvent perçue comme une pratique distraite, la photographie amateur est en réalité mal connue. La place qu’elle occupait dans les campagnes de la première moitié du XX e siècle est encore plus difficilement saisissable. La focalisation sur l’histoire des techniques et sur les plus illustres photographes a maintenu l’essentiel du monde des amateurs dans l’anonymat, tandis que les rares connaissances générales dont nous disposons proviennent de sources publicitaires ou pédagogiques qui ne peuvent être lues sans modération critique. L’étude méthodique de fonds amateurs montre que les campagnes sont touchées par la photographie professionnelle dès la fin du XIX e siècle, du fait de photographes ambulants proposant d’immortaliser une famille entière sur le pas de sa porte, mais également en raison de l’existence de photographes professionnels urbains grâce auxquels les conscrits conservent une trace de leur passage sous les drapeaux. Les premiers temps de la photographie amateur au village datent souvent du début du siècle. Ils sont marqués par l’implication forte et quasiment exclusive des élites sociales et culturelles, la Grande Guerre jouant un rôle d’accélérateur, mais n’enclenchant aucune impulsion décisive. Il faut ensuite attendre les années 1930 pour que se développe une première vague d’acquisition d’appareils, qui n’est que provisoirement interrompue par la Deuxième Guerre mondiale. C’est alors qu’émerge le regard oblique, résultat de l’appropriation technique et culturelle de la pratique photographique par les villageois. Ce phénomène d’adaptation d’une pratique à un ensemble de valeurs est peu décrit et échappe pour l’essentiel à la compréhension de contemporains recroquevillés sur leurs [p. 45] certitudes esthétiques, leurs croyances techniques et leur méconnaissance du reste de la société.

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